Commentaire de Arezki de Montréal (25/08/2007 01:05) :
« Tisedhsa n zman »
Avant-première de « Le rebelle et l’ironie du sort » à Tizi Ouzou
25 juin 2007
Comme annoncé dans nos précédentes éditions, la projection, en
avant-première, du film censé porté sur les écrans la vie de Lounès MATOUB
a bien eu lieu à Tizi Ouzou, dans le cadre du programme de commémoration
mis sur pied par la Fondation Lounès MATOUB au niveau de la Maison de la
Culture Mouloud MAMMERI de Tizi Ouzou, lors de la journée du lundi 25 juin
2007.
Bien des choses ont été dites sur les forums de Kabyle.com, à propos de ce
film, depuis la publication de deux articles le concernant (Voir : « Le
rebelle et l’ironie du sort », première fiction sur la vie de Lounès MATOUB
et L’interview du réalisateur : Hammar Mokrane), afin de clore
définitivement le sujet, nous avons jugé utile d’apporter notre
appréciation de l’œuvre tout en mettant à la disposition de nos lecteurs un
extrait avec, bien sûr, l’autorisation du réalisateur.
De retour du recueillement à Taourirt Moussa (At Mahmoud, At Douala), nous
nous dirigeâmes directement à la Maison de la Culture Mouloud MAMMERI de
Tizi Ouzou où un public assez nombreux est venu visiter l’exposition dédiée
à la mémoire du grand absent de la journée, Lounès MATOUB en l’occurrence,
et s’enquérir, par la même occasion du moyen d’obtenir une invitation - pas
nécessaire selon la rumeur - afin d’assister à l’avant-première du film qui
lui est consacré programmé à 14 heures.
La rumeur s’avéra fausse, l’entrée de la grande salle de la Maison de la
Culture est filtrée par les agents qui demandaient systématiquement la
présentation d’une invitation afin d’y accéder. Ayant eu notre invitation
en main, nous avons quand même pu franchir ce point de contrôle sans aucune
autre forme de procès. Arrivés à l’intérieur, il a fallu patienter une
bonne demi-heure afin que la projection débute, un autre film du même
réalisateur, « Ddigh d yir arfiq », est projeté afin de faire patienter
l’assistance assez nombreuse.
Aux premières images du film, l’on commence déjà à douter qu’il s’agisse
d’une fiction, pourquoi ? L’image montre le réalisateur travaillant sur un
ordinateur et feuilletant le livre écrit par Lounès MATOUB : « Le Rebelle
». Quelques instants plus tard, le même personnage est montré arrivant au
domicile du chanteur, frappant sur sa porte d’entrée et reçu par sa mère
avec laquelle il aura une discussion.
Les premiers mots de Nna Aldjia se rapportent au fait divers raconté par
Lounès lui-même au début de son livre, il s’agit, bien sûr, du jour où il a
été à l’origine du départ d’un feu qui a embrasé une partie des vergers de
son village lors de la guerre de Libération (54-62). Toute de suite après,
place à une reconstitution à la limite du caricatural : La mère de Lounès
(Dans le film) est montrée en train de travailler dans son verger,
s’apercevant du départ du feu, elle dit tout de suite que c’est son fils
qui en est à l’origine. Elle part à sa recherche et la retrouve chez sa
tante. Convoqués à l’assemblée du village, où les attendaient les membres
de celle-ci en discutant de leur cas, ceux-ci se dispersent sans prendre le
soin de parler à leurs vis-à-vis en parfaite contradiction par rapport à ce
que dit Lounès dans son livre.
Nous citons, en page 15 du même livre : « … Ils sont donc venus chez nous
et ont demandé à ma mère de leur livrer le « coupable », dont ils avaient
appris le nom, afin de le juger. Ma mère est allée me chercher. Je n’étais
pas bien grand et m’a installé sur son dos, comme les femmes le font chez
nous. La voyant revenir apparemment seule, les maquisards, un peu énervés,
lui ont demandé où était l’auteur du délit. « Là » leur a simplement dit ma
mère – et elle m’a désigné du doigt. Ils s’attendaient à voir un adulte,
ils ont découvert un petit bonhomme de rien du tout. Pris d’un fou rire,
ils ont eu cette réflexion : Des gosses comme ça voudraient-ils incendier
des villages ? Ils sont l’innocence même. »
Cette scène sera la seule où le concerné sera montré (A travers un
personnage bien sûr), tout au long de la suite du film, il ne sera question
que de dialogues autour de lui, œuvre de différents personnages qui
l’auraient côtoyaient en prison, d’autres qui auraient manifesté pour
demander son transfert à l’étranger lorsqu’il fut blessé en 1988, certains
qui polémiquaient autour de son enlèvement en 1994 et de simples inconnus
qui se chamaillaient au sujet de leurs diverses appréciations du
personnage.
C’est ainsi que les différentes épreuves qu’a eu à vivre Lounès MATOUB,
certaines l’ayant marqué dans sa chaire, se trouvent « survolées » et «
discutaient » dans une sorte de flash-back incessants mixant entre images
réelles, de Lounès et de sa mère, et images reconstituées par des
personnages dont même les éloges laissaient à désirer, ceci, pour ne pas
parler des différentes « critiques » souvent gratuites, dont personne ne
nie l’existence d’ailleurs, mais qui auraient gagné à être balayées au lieu
de leur offrir une seconde vie.
La projection du film prendra fin 68 minutes plus tard, l’assistance, qui
est restée assez sceptique et partagée sur ce qu’elle venait de voir, se
fonda d’applaudissements nourris et « Tighratin » (Youyous) de fuser, une
façon de rendre hommage à Lounès MATOUB et de dire « peut mieux faire » aux
auteurs du film ainsi qu’aux autres qui voudraient se lancer dans la
réalisation d’œuvres sur le même sujet, dommage que le débat qui suit
traditionnellement toute avant-première n’ait pas eu lieu, le réalisateur
aurait gagné en critiques constructives, car, en Kabyle nous disons : «
Hemmalgh ad wtagh gma, karhagh win ara atyewten » (J’aime frappé mon frère,
mais je déteste celui qui le frappe), à méditer !
En définitive, il convient de signaler que le titre du film en Kabyle est :
« Tisedhsa n zman », contrairement à ce qu’ont pensé plusieurs personnes,
le réalisateur a bel et bien pensé à ça. Après visionnage, nous pouvons
considérer qu’il ne s’agit pas d’une fiction à proprement dite, nous
préférons parler d’une sorte de documentaire doublé d’une reconstitution de
faits plus ou moins avérés. Les auteurs du film, qui ont le mérite d’avoir
osé entreprendre pareille aventure, gagneraient à considérer positivement
les « critiques » qui leur ont été apportées par tout un chacun afin de
s’améliorer.
En page 100 du Rebelle, Lounès MATOUB écrivait : « … Je n’ai jamais cherché
à dissimuler les moments difficiles pour donner de moi une image magnifiée,
comme le font certains artistes. Je me présente devant mon public tel que
je suis, et tel que j’ai vécu : c’est le minimum de loyauté que je dois aux
gens qui m’écoutent. », alors, soyons loyaux envers lui à notre tour.
Extrait du film « Tisedhsa n zman » (« Le rebelle et l’ironie du sort »)
Pour Kabyle.com : Djamel BEGGAZ
http://www.kabyle.com/Avant-premiere-de-Le-rebelle-et-l,12376.html
http://kabylie.vip-blog.com
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